Si vous vous êtes déjà intéressé à la psychologie cognitive, vous devez certainement savoir que les biais cognitifs sont des distorsions du jugement qui affectent nos décisions, notre perception et notre raisonnement. Dans le domaine de la formation, ces biais influencent non seulement les apprenants, mais aussi les concepteurs de formations et les ingénieurs pédagogiques. En tant qu'expert en formation, il est essentiel de comprendre l'impact de ces effets cognitifs pour concevoir des parcours pédagogiques plus efficaces et pour mieux appréhender les difficultés rencontrées durant l'apprentissage. Je vous propose d'explorer ensemble l'impact de ces biais cognitifs sur la formation et comment notre cerveau nous joue des tours pour influencer notre tendance à prendre des décisions.
1. L'impact des biais cognitifs sur la conception de formations
Les experts comme Kahneman, un pionnier de la psychologie cognitive, ont montré que notre cerveau utilise des heuristiques, c'est-à-dire des raccourcis mentaux, pour traiter rapidement les informations. Cela peut conduire à des erreurs de jugement, notamment lors de l'ancrage mémoriel de l'apprenant. Ainsi, lorsqu'une équipe pédagogique élabore un programme, elle doit être en mesure de penser aux potentiels biais cognitifs. Et oui, ce n'est parce que vous percevez une information d'une façon que vos apprenants la percevront de cette même façon ! La perception d'une information peut varier d'une personne à une autre, cela peut être dû à plusieurs facteurs tels que ses croyances, son expérience, son raisonnement...
Prenons l'exemple du biais d'ancrage : ce biais cognitif se produit lorsqu'une personne retient davantage la première information reçue alors que cette dernière n'est pas nécessairement la plus importante. Ce biais peut pousser à surestimer l'importance d'une donnée spécifique sans prendre suffisamment de recul.
Autre exemple avec le biais de confirmation : ce biais cognitif pousse une personne à rechercher uniquement des informations qui confirment ses croyances, tout en ignorant ou minimisant celles qui les contredisent. Cela limite alors la capacité des apprenants à s’ouvrir à de nouvelles idées et à revoir des concepts qu’ils pourraient mal comprendre. Vous l'aurez compris, cela peut conduire à un apprentissage biaisé, à une résistance au changement ou même à prendre de mauvaises décisions.
Ainsi, en identifiant ces biais et en les prenant en compte lors de la création de formations, vous serez en mesure de conceptualiser des parcours efficace en ajustant le niveau de perception de chaque apprenant. Rappelez-vous ce que nous avons vu dans notre précédent article : vous devez garder à l’esprit que la pensée rapide et intuitive du système 1 (décrit par Kahneman) n’est pas toujours fiable et qu’il est essentiel d’intégrer une analyse plus approfondie via le système 2, plus lent mais plus rigoureux.
2. L'impact des biais cognitifs sur les apprenants
Les biais cognitifs influencent donc la manière dont les apprenants reçoivent et traitent les informations. mais alors à quoi s'attendre ?
Notre cerveau est souvent victime de heuristiques comme le biais de disponibilité, où une personne a tendance à surévaluer la probabilité d’un événement en fonction de sa mémoire immédiate. En formation, cela signifie que les apprenants pourraient percevoir un concept comme plus pertinent simplement parce qu'il leur est plus familier, et non pas parce qu'il est plus important.
Le biais de perception sélective est également commun en formation. Les apprenants filtrent souvent les informations en fonction de leurs croyances existantes, ce qui peut les empêcher de retenir les nouvelles connaissances. Et, malheureusement, cela peut créer un fossé entre ce que l’on cherche à enseigner et ce que l'apprenant comprend ou retient. En concevant des formations avec ces erreurs cognitives à l'esprit, il est possible de mieux adapter le contenu pour contrer ces effets.
En encourageant une réflexion critique et en diversifiant les formats et modalités pédagogiques, les formateurs peuvent atténuer l’influence des biais chez leurs apprenants. On peut imaginer proposer des exemples variés et des expériences pratiques permet de contourner le biais de disponibilité et d'ancrer plus efficacement les nouvelles connaissances.
3. Comment les équipes de formation peuvent surmonter ces biais
Dans une entreprise, la formation ne concerne pas seulement les individus, mais aussi l’équipe qui développe et encadre les programmes. Les biais cognitifs peuvent influer sur les décisions collectives, notamment dans le cadre du marketing ou lors du choix des outils de formation. Par exemple, le biais d'optimisme peut amener une équipe à sous-estimer les défis qu'un projet pourrait rencontrer, en pensant que tout ira pour le mieux.
Pour réduire ces biais cognitifs, il est important que les décisions soient prises avec des outils de réflexion critique. La mise en place de processus de validation croisés et la diversité des points de vue au sein des équipes peuvent aider à équilibrer ces tendances cognitives. L'analyse collective permet souvent de repérer les erreurs qui auraient pu passer inaperçues lors d'une prise de décision individuelle.
La définition de biais cognitifs et la sensibilisation à leurs effets au sein des équipes peuvent également conduire à des formations plus pertinentes et efficaces. Ainsi, en intégrant des réflexions sur ces biais, les formateurs peuvent concevoir des parcours plus équilibrés, adaptés aux besoins réels des apprenants.
Vous l'aurez compris, les biais cognitifs sont omniprésents dans nos processus de raisonnement et peuvent avoir un impact profond sur la formation, que l'on soit concepteur, formateur ou apprenant. En étant conscients de ces erreurs et en adoptant des stratégies pour les minimiser, il est possible d'améliorer non seulement la qualité des formations, mais aussi l'expérience globale d’apprentissage. Que ce soit au niveau individuel ou collectif, comprendre les effets cognitifs permet de prendre de meilleures décisions et d’éviter de tomber dans les pièges de notre propre pensée.